Qui fait quoi « Matthieu Chatelier fait le point sur l’industrie des VFX et sa relève au Québec »

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Matthieu Chatelier fait le point
sur l’industrie des VFX et sa
relève au Québec


12juin 2024, 04h30 Article rédigé par Félix Poncelet-Marsan


L’auto-proclamé « porte-étendard » des travailleuses et travailleurs de l’industrie
québécoise des effets visuels et de l’animation, Matthieu Chatelier, ne cache pas
son désarroi face à la tournure qu’ont pris les événements au sein de son milieu.
Actif sur la scène professionnelle et académique de son domaine depuis une
vingtaine d’années, l’organisateur du sit-in « Le Québec n’a plus d’effet(s) »
s’inquiète non seulement pour l’avenir de ses collè-gues actuels, mais également
pour celui des étudiants dont il a la charge. Qui fait Quoi est allé à sa rencontre
pour faire le point sur la situation.


Ayant migré au Québec en 2004. après cinq ans d’activité dans le domaine des effets visuels
en France, Matthieu Chatelier s’est rapidement forgé une place au sein de l’industrie
québécoise en tant que spécialiste de l’intégration et de la composition d’images. Sa carrière
l’a mené à opérer chez des entreprises telles qu’Hybride, Rodeo FX et plus récemment FOLKS,
en plus de travailler à son compte sur une période de dix ans. L’accumulation de ses
compétences en effets visuels – particulièrement ceux liés à la pyrotechnie – a firni par le
convaincre de les transmettre à ses successeurs en devenant chargé de cours pour
l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingyg_(UQAT)..
« Ça fait quatre ans maintenant que j’ai commencé à enseigner le compositing au campus de
Montréal, souligne Matthieu Chatelier. Ça faisait déjà quelque temps que je voulais diversifier
ce que je faisais et je trouvais qu’avec mon expérience, ce serait pertinent de transmettre mon
savoir à la relève. Ce que je trouve très, très valorisant, c’est vraiment de voir les étudiants
apprendre, évoluer et réutiliser ce qu’on leur enseigne dans leurs propres projets et dans leur
parcours professionnel. Il y a même certaines personnes qui travaillent avec moi aujourd’hui
qui sont mes anciens étudiants. En tant que prof, c’est une belle récompense, ça boucle la
boucle 1 »
Malheureusement. le mentor en effets visuels craint fortement que les étudiants dont il a la
charge ne puissent exercer leurs apprentissages en province, au vu de l’état actuel de
l’industrie. En effet, le ralentissement du milieu, causé a priori par la double grève survenue à
Hollywood en 2023, a été considérablement amplifié par les modifications fiscales que lui ont
récemment imposé Québec. Cette dégradation se remarque par la chute du nombre
d’employés actifs entre 2022 et 2023, qui est passé de plus de 8000 à près de 4600, selon les
données du Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTO)_. Le représentant estime
que le taux de travailleurs en VFX au chômage sera de 67% au mois d’août prochain, ce qui ne
calme ni l’industrie en général, ni Matthieu Chatelier spécifiquement.
<< L’impact, je le vois sur mon lieu de travail et partout sur le terrain :tout le monde est affecté
de la même façon et ça empire de jours en jours et de semaines en semaines. Les gens avec
qui on travaille disparaissent à vue d’oeil. On voit sur Linkedln de plus en plus de petites
pastilles vertes qui indiquent que les gens sont ouverts au travail, qu’ils ont perdu leur emploi.
L’impact est réel, concret, ça créé beaucoup de stress. Les perspectives sont
malheureusement très sombres. À défaut d’une réaction du gouvernement, on se dirige vers
une situation catastrophique. C’est une hémorragie qu’on constate. »


D’ailleurs, le spécialiste en composition d’images ne peut s’empêcher de lever un sourcil
devant les décisions du provincial, qui investira 42 millions de dollars pour valoriser la relève
en création numérigue à l’illôt Balmoral. Matthieu Chatelier y voit un message contradictoire,
puisque ce gain pour la relève arrive au moment où le milieu professionnel subit l’inverse. Il
ajoute que l’industrie des effets visuels ne sera pas en mesure d’accueill ir les futurs diplômés
de l’établissement si Québec continue de lui couper les vivres. « La modification au crédit
d’impôt va vers la baisse, on n’encourage pas le milieu professionnel. Je suis inquiet pour les
étudiants, qui ont choisi cette carrière-là et qui se retrouvent maintenant à se demander
qu’est-ce qu’ils vont faire une fois sortis de l’école. C’est paradoxal. »


Enfin, Matthieu Chatelier craint que le Québec ne perde sa position de pôle mondial de
l’industrie des effets visuels si la tendance se maintient, puisque de nombreux travailleurs du
milieu risquent de quitter la province pour trouver de l’ouvrage ailleurs. Il espère donc que le
gouvernement fasse preuve d’écoute et négocie avec le milieu, pour que celui-ci puisse
continuer à exister et rayonner à l’international. « Je suis dévasté de voir la direction que
prennent les événements auJourd’hui, mais j’ai encore espoir que le gouvernement entende
notre appel et qu’on trouve tous ensemble une issue à cette situation qui soit favorable. ,.
Le sit-in pacifique « Le Québec n’a plus d’effet(s) » aura lieu samedi le 15 juin en après-midi, à
la Place de la Dauversière dans le Vieux-Montréal.

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